Chaque année, le 15 mai, je deviens invivable. Cette date correspond à l’anniversaire de la mort de mon grand-père, et pendant des années, je me suis reproché de ne pas avoir été assez présent durant ses derniers mois. Ce qui m’énervait, c’est que cette rechute émotionnelle arrivait toujours par surprise. Un matin, je me réveillais sombre, irritable, rongé par la culpabilité, sans comprendre pourquoi. Puis je réalisais la date et je me disais « ah oui, c’est normal ». Cette réaction automatique me gâchait systématiquement plusieurs jours. L’année dernière, j’ai enfin décidé d’anticiper. Dès début mai, j’ai préparé un plan : activités positives, temps avec mes proches, techniques de gestion émotionnelle. Résultat ? Cette date redoutée s’est transformée en journée de célébration de sa mémoire au lieu d’être un calvaire.
Vous aussi, vous avez des moments où vos regrets ressurgissent de nulle part ? Ces rechutes émotionnelles qui vous prennent par surprise et vous déstabilisent pendant des jours ?
Le piège des embuscades émotionnelles
Nos regrets ne ressurgissent pas au hasard. Ils sont déclenchés par des éléments spécifiques : dates, lieux, personnes, situations, odeurs, musiques. Le problème ? La plupart du temps, on ne fait pas le lien consciemment entre le déclencheur et notre état émotionnel.
Cette inconscience nous rend vulnérables. On subit passivement ces « embuscades » émotionnelles sans pouvoir s’y préparer. Un déclencheur survient, nos regrets ressurgissent brutalement, et on passe plusieurs jours à ruminer avant de comprendre ce qui s’est passé.
Résultat : on vit dans l’appréhension de ces rechutes imprévisibles qui peuvent gâcher notre humeur à tout moment. Cette impuissance face à nos propres réactions nous maintient dans un état de fragilité émotionnelle constant.
Pourtant, identifier et anticiper ces déclencheurs peut transformer complètement notre relation aux regrets.
La technique de cartographie des déclencheurs
Cette méthode vous permet d’identifier précisément ce qui réactive vos regrets pour vous y préparer efficacement et réduire leur impact.
Étape 1 : Tenir un journal des rechutes
Pendant un mois, notez chaque fois que vos regrets refont surface. Pour chaque épisode, documentez : date, heure, lieu, contexte, personnes présentes, état physique, événements récents.
Étape 2 : Identifier les patterns
Après ce mois d’observation, cherchez les récurrences : certaines dates (anniversaires), certains lieux (ancienne maison), certaines situations (conflits), certaines personnes (ex-collègues).
Étape 3 : Classer par catégories
Organisez vos déclencheurs en familles : temporels (dates anniversaires), sensoriels (musiques, odeurs), sociaux (personnes spécifiques), situationnels (stress professionnel), physiques (fatigue).
Étape 4 : Créer des protocoles de prévention
Pour chaque déclencheur identifié, préparez une stratégie d’anticipation : activités alternatives, techniques de gestion émotionnelle, soutien social, évitement temporaire si nécessaire.
Étape 5 : Programmer des rappels
Mettez en place des alertes dans votre calendrier pour vous préparer à l’avance aux déclencheurs prévisibles (dates anniversaires, événements familiaux).
Mon expérience avec l’anniversaire de grand-père
En appliquant cette cartographie, j’ai découvert mes patterns :
Journal des rechutes : 15 mai (date de décès), photos de famille étalées, conversations sur la maladie, certaines chansons qu’il aimait, odeur de pipe.
Protocole de prévention : les deux semaines avant le 15 mai, je planifie des activités positives, je préviens mes proches que je pourrais avoir besoin de soutien, je prépare un rituel de célébration de sa mémoire.
Résultat concret : au lieu de subir cette date, je la transforme en moment de connexion positive avec son souvenir. Cette année, j’ai organisé un repas de famille avec ses plats préférés. La tristesse était là, mais accompagnée de joie et de gratitude.
Un exemple frappant de transformation
Céline, manager de 38 ans, vivait des rechutes de regrets chaque fois qu’elle passait devant son ancienne école de commerce. Elle regrettait d’avoir quitté ses études pour des raisons financières.
En cartographiant ses déclencheurs : ce lieu spécifique, les discussions sur les MBA, les success stories d’anciens camarades sur LinkedIn, la rentrée scolaire de septembre.
Son protocole : modifier son trajet pour éviter l’école temporairement, limiter LinkedIn en septembre, se rappeler ses propres réussites professionnelles, planifier une formation enrichissante à la rentrée.
« Maintenant je ne subis plus ces moments. Quand je sens que septembre arrive, je me prépare émotionnellement et je transforme cette période en opportunité d’apprentissage au lieu de la subir. »
Pourquoi cette anticipation révolutionne votre bien-être
Mon opinion après avoir testé cette approche : elle fonctionne parce qu’elle transforme l’impuissance en pouvoir d’action. Au lieu de subir passivement nos rechutes, on devient stratégique dans notre gestion émotionnelle.
C’est comme connaître les horaires des orages pour sortir avec un parapluie. On ne contrôle pas la météo émotionnelle, mais on peut s’y préparer intelligemment.
5 types de déclencheurs universels à surveiller
- Dates anniversaires sensibles : Décès, ruptures, échecs, anniversaires de personnes perdues – ces dates réactivent souvent des regrets spécifiques.
- Lieux chargés émotionnellement : Anciens bureaux, maisons d’enfance, hôpitaux – ces espaces peuvent déclencher des souvenirs douloureux instantanément.
- Stimuli sensoriels puissants : Parfums, musiques, saveurs associées à des périodes regrettées – nos sens sont des déclencheurs très directs.
- Situations de stress similaires : Conflits, évaluations professionnelles, prises de décision importantes – qui rappellent d’anciens échecs.
- Personnes liées aux regrets : Ex-partenaires, anciens collègues, témoins d’échecs passés – leurs présences peuvent réactiver d’anciens schémas.
Des transformations préventives
David, entrepreneur, a identifié que ses regrets d’échec business ressurgissent à chaque fin d’année fiscale : « Maintenant je prépare cette période avec un bilan positif de mes réussites et un plan d’action pour l’année suivante. Cette anticipation transforme une période difficile en moment de motivation. »
Marie, mère de famille, a découvert que ses regrets parentaux s’intensifient pendant les vacances scolaires : « Je programme maintenant des activités plaisantes avec les enfants et je me rappelle mes réussites éducatives. Les vacances sont redevenues des moments de joie familiale. »
Cette technique m’a appris que nos émotions suivent des patterns prévisibles qu’on peut anticiper et transformer.






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